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Mastodon – Crack The Skye (Partie 1)

En ce 24 mars, l’album Crack The Skye de Mastodon fête ses 10 ans. Dans cette première partie, on va revenir sur l’histoire racontée par l’album.

Nous sommes à la fin de la première décennie du XXIe siècle. Mastodon, quatuor d’Atlanta, monte en estime auprès des fans & des critiques à chaque album. Le premier, Remission, est une immense tarte sludge dans la face. Il est surtout le début d’une quadrilogie d’albums concepts autour des éléments- ici, le feu. Vient ensuite l’eau en 2004, avec Leviathan. Construit autour de Moby Dick d’Herman Melville, ce deuxième opus laisse entrevoir quelques inspirations progressives à travers ses titres. On y retrouve aussi deux choses qui deviendront des habitudes : un morceau d’ouverture incroyable, ici « Blood And Thunder » & un featuring de Scott Kelly qu’on retrouve sur « Aqua Dementia ».

Encore aujourd’hui, les fans du groupe s’écharpent pour savoir s’il s’agit du meilleur album de la discographie. D’aucun diraient qu’il s’agit même de la meilleure sortie metal de la décennie. Mais les joyeux lurons ne s’arrêtent pas là puisqu’en 2006 sort Blood Mountain, axé autour de la terre. Une sortie unanimement saluée pour son mélange entre sludge des débuts et inspirations progressives plus abouties comme sur « Sleeping Giant » ou « Colony Of Birchmen ». On retrouve d’ailleurs un certain Josh Homme en featuring sur ce morceau. Chaque LP est une réussite et les fans sont de plus en plus nombreux.

En 2007, Brent Hinds, guitariste soliste de Mastodon, est saoul suite à une soirée avec Dave Grohl. Il en vient à se battre avec un ami de Shavo Odadjian, qui va lui causer de grosses blessures, notamment au visage. Il passera d’ailleurs proche de la mort. Sa convalescence va l’inspirer pour composer les riffs du 4e album de son groupe. Pendant 6 mois, le quatuor va bùcher avec le producteur Brendan O’Brien pour proposer une expérience incroyable. De tout ça débouchera Crack The Skye, dernier pan de la quadrilogie des éléments. C’est l’éther qui est au centre de cette création, logique quand on connaît l’histoire racontée par cet album.

Oblivion

Ouverture sur le single et un riff plutôt lent mais instantanément reconnaissable. L’ambiance monte avant que le rythme s’accélère et que pour la première fois, Brann Dailor use de sa voix. Excellent derrière les fûts, on va le découvrir magnifique au micro, grâce à sa voix aigüe qui va permettre plus de variété dans les lignes vocales. Il nous présente l’histoire, celle d’un homme, tétraplégique, qui se sert du voyage astral pour aller dans l’espace. Son âme sort de son corps et est reliée à celui-ci par un cordon. Sauf qu’en s’approchant trop près du soleil, elle se voit détachée de son propriétaire.

I flew beyond the sun before it was time
Burning all the gold that held me inside my shell

Une situation qui sera confirmée par le refrain, porté par la voix particulière de Brent Hinds.

Falling from grace cause I’ve been away too long
Leaving you behind with my lonesome song
Now I’m lost in oblivion

Ce dernier va aussi nous gratifier d’un solo incroyable. Il parvient à nous transmettre une émotion avec sa guitare, quelque chose qu’il rééditera plus tard sur le disque. On se quitte sur une merveille de chanson pour enchaîner avec le titre le plus court de l’album.

Divinations

On change directement d’ambiance avec quelque chose de plus rapide si on compare à l’atmosphère lancinante du morceau précédent. Notre âme est toujours dans l’espace et va se retrouver dans un wormhole ou « trou de ver » dans la langue de Molière. Pour simplifier, c’est un endroit qui réunirait deux espaces-temps. Son aventure va l’amener à rencontrer des Nécromanciens qui vont l’envoyer dans le corps de Raspoutine, dont la mort est imminente.

The wormhole is empty
The center of Khlysty surrounds me
The fire is dancing in a silvery sheet of breath
Black robe
Necromancing
Summon the soul of the spectre

Ce voyage à travers le Wormhole est parfaitement imagé par le solo de Brent Hinds qui amène sur ses couplets une voix plus rauque que sur « Oblivion ».

Quintessence

On retrouve des claviers assez aériens sur le début du morceau pour laisser place à une certaine montée en puissance dans les riffs et la noirceur des paroles. Ce titre raconte la rencontre de l’âme du protagoniste avec Raspoutine jusqu’à son intégration du corps de celui-ci en toute fin de titre. Ce moment contraste complètement avec le reste, puisqu’on retrouve un tempo lent et la voix caverneuse de Troy Sanders. Les claviers sont de retour pour amorcer une transition vers la 4e piste.

Shield failure
Speed farewell

The Czar

Pour terminer la face A, on s’attaque à un gros morceau. Une pièce en 4 actes qui pourraient presque être 4 chansons distinctes. La force de Mastodon est d’en faire un chef d’œuvre de 11 minutes.

On débute avec « Usurper » et ses claviers éthérés. Les voix se font très légères. L’ambiance est mystique, parfaite pour coller avec Raspoutine. Ce dernier est prévenu que ses jours sont comptés. Son plan d’assassiner le Tsar a été découvert.

Don’t stay; run away
He has ordered assassination
Don’t stay; run away
The henchmen are gathered and waiting
Don’t stay; run away
Your role as usurper is found out
Don’t stay; run away
Czarina has warned of the danger

S’en suit « Escape », une partie plus pêchue qui va suivre la fuite de Raspoutine. Le tempo s’accélère, ce qui colle avec l’urgence de la situation. Le nécromancien étant proche de la mort, empoisonné pour ses méfaits.

By the light of the moon
You must escape into the deep black of the night
Fight the devil inside
Enemies poison deep within my second sight

Arrive une partie très intéressante avec un ping-pong entre Brent Hinds & Troy Sanders qui représentent Raspoutine & notre protagoniste. D’un coté,  » The usurper » réussit sa quête d’assassinat du Tsar mais en faisant cela, il meurt d’une balle dans la tête, ce qu’on peut lire avec le « Shattered Crown ». Cette ligne est aussi une métaphore pour désigner un régicide. De l’autre, nous avons le héros qui comprend la situation dans laquelle il se trouve. Il réalise que Raspoutine s’est sacrifié, faisant de lui un martyr.


Ride the tides of blood
Illumination
Beauties sudden hand
Shattered crown
Stretching arms up high
We’re on our way now
Leave the Czar to die

Les choses sont bien faites, puisque la 3e partie se nomme « Martyr ». On retombe dans une ambiance plus sombre, plus lente. Les claviers sont de retour pour signaler l’envol vers les cieux des deux âmes.

Spiraling up through the crack in the sky
Leaving material world behind
I see your face in constellations
The martyr is ending his life for mine

S’en-suit un sublime solo de Brent Hinds puis une 4e partie nommée « Spiral », qui revient sur le début de la chanson. Seule différence, l’ajout de nouvelles harmonies vocales pour donner encore plus de charme à cette fin. D’ailleurs, ces nouvelles voix sont celles de Brann Dailor & Brendan O’Brien, le producteur de l’album.

Ghost of Karelia

La face B attaque avec de petits coups de cymbales & un triangle, de quoi se remettre de nos émotions après le chef d’œuvre qu’est « The Czar ». Dès le début, on apprend que les deux protagonistes se retrouvent devant un dieu/juge des morts. Les paroles parlent d’un crâne rempli de sang ou encore de 9 yeux. En recoupant, on peut donc s’imaginer que nos âmes sont devant Yama, dieu & juge des morts de la mythologie Bouddhiste Tibétaine : la première phrase se retrouvant même dans le Tibetan Book Of The Dead.

Wrathful ones nine eyes gaze
Holding skulls
Filled and laced
With human blood

Le jugement du dieu va envoyer nos âmes dans un endroit entre la Terre et le paradis, sauf qu’avec l’accompagnement musical autour, on se rend compte qu’il s’agit d’une épreuve à subir au cours de laquelle il ne faudra pas se laisser tomber. Si on veut continuer avec la musique, on peut signaler la présence d’un solo de guitare plutôt black metal, genre qui se prête aux allusions au satanisme et à l’occulte.

Between heaven and Earth
Wisdom and the knower
A planet collide
Divisible we fall

La fin de la chanson reboucle avec les premières paroles et la même instrumentation. Référence subtile au voyage dans l’éther et au cycle de la vie qui recommence ce qui nous laisse penser que le protagoniste va retrouver son enveloppe physique. Entre-temps, Raspoutine (Sinister Twin) affronte ses démons (Choking On Fear) et se rapproche de l’enfer après l’apparition de ses démons passés.

Sinister twin
Choking on fear
Bonded iron
Sink to the core

Crack The Skye

Les deux âmes ont traversé l’enfer et s’en sont sorti. Nous restons volontairement vague sur cette chanson qui se verra développée plus profondément lors de la partie 2. Notez cependant qu’on retrouve l’habituel featuring de Scott Kelly sur ce titre et qu’il nous gratifie d’une prestation incroyable.

The Last Baron

Cette dernière chanson parle du voyage que font les deux âmes pour que celle du protagoniste retrouve son enveloppe physique. Et cette dernière se sent affaiblie et fatiguée. Elle demande l’aide de Raspoutine.

Please, please take my hand
Please take my soul to rest
So we can always be around

It is hard to see
Through all the haze at the top of the trees
Hold my head on stable ground
Watch as the earth falls all around

Cependant, dans son trajet, notre personnage principal reste tiraillé entre les deux facettes de Raspoutine. Son côté diabolique et sorcier, mais aussi son côté sauveur. Il reste quand même en plein doute sur sa capacité à rentrer dans son corps.

I have no fear as your wing is my shelter Cyanide he craves
Coursing through his veins
Providing him with strength
To see this to the end
Afraid of psychic eyes
Faith in mystic power
The last baron
The last baron
Will he save me?

On arrive au point central de cette chanson, celle qui laisse le plus de débats autour de la fin de l’histoire. Plusieurs interprétations existent et le groupe a bien pris soin de laisser une fin ouverte. Tout se joue avec ces deux lignes répétées plusieurs fois.


I was standing staring at the world
And I can’t see it

Première théorie, l’âme est retournée dans son corps mais le personnage ne peut plus faire de voyages astraux, du fait de la disparition de son cordon depuis « Oblivion ». Il ne peut donc plus contempler le monde du fait de sa paralysie.

Deuxième théorie, l’âme retrouve son enveloppe, mais ses parents l’ayant cru mort, il est enterré 6 pieds sous terre. Il est donc aveugle du fait de sa situation. Une théorie qui s’emboîte bien avec celle supposant que les 7 titres de Crack The Skye sont les 7 étapes du déni qu’une personne subit après un décès. « The Last Baron » serait l’étape de l’acceptation, poussant les parents de notre personnage à l’enterrer.

Vous l’aurez compris, Crack The Skye est une oeuvre complexe qui fait voyager son auditeur à travers ses thèmes mais aussi sa musique. Mais il cache une part bien plus sombre que l’on va vous détailler dans une partie 2.

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